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Dans notre récente publication, nous avons essayer de définir le Bo ( gris gris ) dans toute sa dimension pour aborder ses diverses composantes que sont : Le Bomansi, le Nudida. La présente publication est la suite de la première. Elle évoque la relation entre le Bo et le Kpé, le Bo et le Nudjidjré, Le Gbesa et le Nunyi etc
Judicaël ZOHOUN
Le Kpé et le Bo
Le Kpé est le procédé par lequel on obtient nécessairement ce que l’on souhaite, ce que l’on désire quelle qu’en soit la nature. En général, c’est un mélange de savon noir, de feuilles calcinées et pulvérisées pétris dans la coquille d’un escargot, d’un œuf ou d’une corne d’animal. On utilise en y touchant sa langue un certain nombre de fois, le matin au saut du lit avant d’adresser la parole à quelqu’un. Après son usage, il est recommandé de ne pas dire du mal à quelqu’un mais seulement du bien car tout ce que l’on dit se réalise avant la fin de la journée. Retour ligne automatique
L’utilisateur du Kpé se dit ״Tchékpémèton.״ On a pris l’habitude de considérer l’emploi du Kpé pour nuire à autrui de façon spectaculaire et on a oublié que le Kpé peut servir aussi à faire du bien. Le ״gbinsuhon״ est un genre de Kpé très redouté en bien comme en mal. Pour le confectionner ou le monter comme nous avons dit au début de la définition du Bo, il faut : du savon noir, une aiguille rouge et une aiguille noire. Enfoncer les aiguilles dans du savon noir. Si l’on veut maudire quelqu’un, on prend l’aiguille rouge, on fait passer sept fois sur le bout de la langue et on dit tout le mal qu’on veut à quelqu’un. Si on veut bénir quelqu’un, on prend l’aiguille blanche, on la trempe dans le savon noir et on la touche du bout de la langue sept fois et puis on dit tout le bien qu’on souhaite à l’individu. La coquille de l’escargot est réceptacle de tous les ingrédients cités et c’est d’ailleurs le nom indigène de l’escargot que porte ce Kpé. Il y en a d’autres formes plus raffinées et plus subtiles parce que plus discrètes. L’emploi immodéré des Kpé abime les dents et rend même des fois édenté. Dans la pratique, il est conseillé de s’en méfier, surtout si on est un chef ou un père de famille. On a tendance à vanter ses effets. C’est pourquoi, certains le considèrent comme bizarre dans ses manifestations.
Bo et Nudjidjrè
Le Bo est différent du Nudjidjrè. Le Nudjidjrè relève de la démonstration, de la prestidigitation pour distraire les gens, les étonner merveilleusement ; il s’apparente à la magie. Par des forces presque démoniaques, le nudjidjrè produit des manifestations qui dépassent l’entendement humain. Un homme peut cracher du feu. On peut à partir d’un seul pigeon en avoir une vingtaine. On peut à partir d’une seule bouteille de boisson parvenir à faire boire toute une foule. Le Nudjidjrè est réservé à celui qu’on appelle ״nudjrèto״ ; il est pour le commun des gens un magicien car ses faits et gestes font réfléchir et se distinguent de ce que nous appelons ״nusinu״, présage, avertissement, signe avant coureur.
Le Nudida et le Bo
Le ״Nudida״, nu, chose, dida, préparée. Sous forme contractée, ״Ndida״. C’est souvent la noix de gentiane, préparée avec du sang d’un oiseau, pigeon, canard, que l’on mange le matin au saut du lit ou quand on se sent en danger pour se protéger contre le mauvais sort en prononçant des incantations qu’on appelle en fon,
"Gbésisa","Bogbé"
Le Nudida en tant que préliminaire à toute opération du Bo nous introduit dans le deuxième aspect du Bo, l’aspect immatériel du Bo. Retour ligne automatique
L’aspect immatériel du BoRetour ligne automatique
Le verbe est un élément constitutif invisible mais intelligible du Bo. C’est cet aspect qui donne au Bo tout son sens et sa portée. En fon, il est appelé Bogbé, Gbessissa, Nunyi que l’on traduit par incantation en tant que parole qui accomplit le Bo.
Le Bogbé
Le Bogbé, c’est le verbe, la voix ou le langage du Bo. L’expression fon l’explique clairement : "Ama wa Bodé a na sa gbé ton an kpoli tula sa bogbé". Ce qui signifie « Si tu n’as pas fait un gris-gris, tu ne pourras pas en dire la parole incantatoire, Kpoli, tula a dit une parole de Bo. »
Le Bogbé est spécifique à un Bo donné. Certains Bo ont besoin d’être complétés par leur Bogbé au cours de leur montage, d’autres seulement au cours de leur utilisation, d’autres enfin en d’autres circonstances pour accorder à l’utilisateur, toute l’efficience requise. Le Bogbé se présente sous des formes diverses, soit de serment, soit de voeu, de souhait, de prière, soit d’interjection, soit d’hymne, soit de simples formules ordinaires.
Le Gbesisa ou le Gbesa
Le Gbesisa" ou "Gbesa" est souvent confondu avec le Bogbé. Et pourtant, il s’en distingue par le fait qu’il est l’auto-suggestion, la conviction et la persuasion qu’a l’individu de la réalisation de son désir, de son souhait, de son vœu, de sa prière. Avec le Gbesisa, l’auteur se donne pleine confiance, pleine assurance qu’il va réussir ce qu’il entreprend ainsi exactement selon sa sollicitude. Lorsque le tradi-praticien fait une potion à son malade avant de la lui donner à consommer, il "sagbé", il prononce gbesisa qui rend le médicament efficace. Le gbesisa donne à la potion préparée toute sa vertu thérapeutique escomptée. Au niveau de l’individu bénéficiaire du gbesisa, il est rassuré qu’il aura gain de cause. Le gbesisa qui accompagne quelque chose, rend cela efficient.
Lorsqu’en cas de difficulté, on ne fait pas recours à un Bo précis, mais une simple incantation, on ne parle plus de gbesa, ni de bogbé mais de nunyi.
Le « Nunyi »
Parlant de Nunyi , Jean Marie Apovo écrit : « Le nunyi en lui même n’est composé que de parole ; il n’y a d’autres supports matériels que des vibrations sonores, auditives. Le nunyi est prononcé en cas de difficulté de tout genre et consiste à prononcer les noms occultes, les noms premiers comme le dit Olympe Bhèly Quenum des choses. Quand l’individu en cas de danger est dépourvu de tous moyens de défense, de toutes armes, il prononce des nunyi, qui ici transforment la perception de la situation en permettant de passer de la peur à la maîtrise de soi, de la méfiance à la confiance en soi, du découragement au courage, d’épouvanter, de terrasser l’adversaire en cas d’hostilité ou d’agression pour réduire l’ennemi à sa plus simple expression. Le nunyi donne le salut d’un côté et la mort de l’autre. Par exemple, avec le nunyi, on peut ramener à la vie celui qui est déjà dans le coma. Avec le nunyi, on peut extirper de la tête d’un individu, les maux qui le harcèlent. Avec le nunyi, on peut condamner quelqu’un à commettre un crime, à faire un accident grave. Avec le nunyi, on peut obliger une femme récalcitrante et rétive à se rendre. Avec le nunyi, on peut exorciser, disperser les mauvais esprits qui vous hantent . »Retour ligne automatique
Le gbesisa, le nunyi introduisent l’ordre, la paix ; dans le cas du mal, ils introduisent désordre, malheur, maladie, mort.Retour ligne automatique
Enfin l’expression fon « sagbédomin », traduit l’idée maléfique de la parole.
Ainsi se présente le Bo et son univers. Un savoir dont le fonctionnement repose sur des principes et des règles
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